Olnes, 17 décembre, 2009.
Après des études en électronique à l'Institut Supérieur d'Enseignement Technologique de la Haute École de Liège, Jean Herben a travaillé comme technicien chez divers revendeurs de matériel audio et vidéo, puis comme responsable technique dans une entreprise de service après-vente. C'est par vocation, qu'en 1978, il est lui-même devenu professeur à l'Institut Supérieur d'Enseignement Technologique de la Haute École de Liège, où il dirige une classe sur la télévision et la vidéo. Il a durant son parcours acquis une expérience en particulier dans le dépannage des équipements audio-vidéo grand public tels les magnétoscopes, les caméscopes et les téléviseurs. Son goût pour la résolution des problèmes techniques et la maintenance des équipements, l'a mené dès 1988 à écrire une série de livres actuellement édités par DUNOD sur la maintenance et le dépannage des téléviseurs, des magnétoscopes, des caméscopes et des lecteurs optiques.
Emanuel Lorrain (PACKED VZW) a rencontré Jean Herben afin de recueillir son expérience et savoir quels éléments sont importants pour gérer les risques de pannes et de défaillances avec ce type d'équipements défini comme « grand public » et souvent utilisé par les artistes vidéo.
PACKED : Quelle est votre formation, comment êtes-vous arrivé à la vidéo ?
Jean Herben : Mon cursus scolaire est relativement simple. En 1970, je suis sorti de l'école où j'enseigne aujourd'hui, l'Institut Supérieur d'Enseignement Technologique à Liège. À l'époque, ce titre se nommait « gradué en électronique », cela équivaut au niveau Bac + 3 d'aujourd'hui ou bachelor. C'est un complet hasard qui m'a ensuite mené vers la vidéo. À l'époque de mes études, il n'y avait qu'une seule section qui s'intitulait « électronique ». C'est seulement à la fin de mes études que j'ai postulé pour un poste chez un dépanneur parce je voulais travailler sans perdre de temps. Au sortir des études, j'ai donc travaillé huit ans dans différentes entreprises privées de maintenance, principalement ciblées sur les téléviseurs ainsi que sur le matériel audio tel que des enregistreurs ou des amplis. J'ai commencé ma carrière au moment de l'arrivée des téléviseurs couleurs.
PACKED : C'est donc la pratique du dépannage qui vous a mené plus tard vers l'enseignement de la télévision et de la vidéo ?
Jean Herben : Oui, durant mes années en tant que professionnel, j'ai toujours étudié les pannes qui m'avaient posé des problèmes en récoltant des documents et en prenant des notes. Comme j'avais toujours eu le souhait d'enseigner, j'ai par la suite postulé pour un poste de professeur que j'occupe toujours à l'ISET où je dirige une classe d'électronique en audio-vidéo.
PACKED : À quel moment avez-vous commencé à travailler avec les magnétoscopes ?
Jean Herben : Les premiers lecteurs VHS1 et Betamax2 sont apparus sur le marché lorsque j'ai commencé à enseigner, et j’assurais alors des cours sur la télévision. Les réparateurs ne touchaient pas aux premiers magnétoscopes VCR3 car la technologie était nouvelle et les fabricants assuraient eux-même la maintenance et le dépannage. C'était une époque où il existait des services techniques absolument partout. Philips par exemple avait un très grand centre à Evere4 et ensuite un service de dépannage dans chaque grande ville belge avec cinq à six techniciens par centre. Les VCR étaient vraiment des appareils barbares, le N1500 et le N17005 n'étaient pas compatibles et il y avait aussi le SVR de Grundig6.
Donc parallèlement à mes cours, j’ai continué à me tenir informé des évolutions techniques de la vidéo. Si je suis venu aux magnétoscopes, c'est sur la demande d'un ami qui souhaitait monter une entreprise de dépannage. C’était l'occasion de travailler sur les magnétoscopes et de fil en aiguille, je me suis retrouvé à être un des premiers à m'occuper de la maintenance des magnétoscopes en dehors des firmes elles-même. À l'époque, je m'intéressais aussi aux caméscopes car j'avais remarqué un véritable vide en matière de maintenance. Comme je faisais cela parallèlement à mon emploi de professeur, petit à petit, j'ai commencé à inclure cela dans mes cours à la Haute-Ecole de Liège.
PACKED : C'est donc l'envie de travailler sur des magnétoscopes et des caméscopes qui vous a poussé à revenir à la maintenance ?
Jean Herben : Oui, car cette entreprise n'était pas notre gagne-pain, étant donné que nous étions tous les deux professeurs et les techniciens étaient d'anciens étudiants. Je n'ai d'ailleurs pas investi d'argent dans l'entreprise et je n’ai jamais été rémunéré car seuls les aspects techniques m'intéressaient. L'objectif n'était pas de s'enrichir ou de « réaliser des affaires » mais de proposer un service haut de gamme. C'est aussi pourquoi ce centre est devenu un des tous premiers à travailler pour Philips par exemple. L'entreprise s'appelait Telectro7, et elle est devenue un centre de dépannage agréé pour Philips, Hitachi, Panasonic et surtout Sony. La diminution des prix du matériel entre autres choses a fait régresser la réparation de façon drastique. J'ai arrêté ma collaboration officielle en 2000, en bons termes, et l'entreprise a arrêté ses activités – par ailleurs toujours florissantes – en août 2009.
PACKED : Quand avez-vous commencé à écrire sur le dépannage et la maintenance des équipements d’audio-vidéo ?
Jean Herben : J'ai toujours eu le goût des cahiers de cours bien organisés lorsque j'étais étudiant et j'ai conservé cette habitude lorsque j'ai du structurer mes propres cours. Ensuite, l'idée d'en faire des livres a germé assez naturellement, mais un premier projet avec un éditeur qui m'avait contacté, est tombé à l'eau. C'est plus tard, après avoir été mis en relation avec BCM8, qui est devenu mon premier éditeur, que le premier livre est sorti. BCM pensait qu'il y avait un public pour ce genre d'ouvrages.
PACKED : Quels types de lectorat visiez-vous ?
Jean Herben : Principalement les étudiants en électronique, en audio-vidéo et les techniciens de maintenance.
PACKED : Combien de livres a fini par éditer BCM ?
Jean Herben : BCM a édité deux livres, un sur les lecteurs de CD et un sur les magnétoscopes. Les problèmes avec les lecteurs de CD commençaient et comme ils restaient chers, la maintenance avait un réel intérêt. Dès que les prix des lecteurs CD ont baissés, le livre ne s'est plus beaucoup vendu. En revanche, le livre sur les magnétoscopes, édité la première fois en 1988, a lui bien marché pour un ouvrage de ce type, une deuxième édition a été produite l’année suivante.
BMC a ensuite arrêté de faire de l'édition et c'est Dunod qui a d’abord édité deux tomes sur la télévision et sur la maintenance des téléviseurs, puis réédité le livre sur les magnétoscopes et produit ceux qui ont suivi. Cela est assez ironique, puisqu'à l'époque où je cherchais un premier éditeur pour mon livre, j'avais envoyé des extraits à Dunod, qui n'était pas du tout intéressé. Ils m'avaient répondu qu'ils ne voyaient pas ce que mon livre contenait de nouveau par rapport aux autres livres, alors qu'il n'existait encore aucun ouvrage de ce type sur les magnétoscopes.
PACKED : Combien de livres avez-vous publié chez Dunod ?
Jean Herben : Les deux premiers livres que j'ai fait pour Dunod étaient sur la télévision, puis un sur la maintenance des magnétoscopes, un troisième sur les téléviseurs, deux sur les caméscopes, un quatrième puis un cinquième sur les téléviseurs, un sur les pannes de magnétoscopes et un sur les lecteurs/enregistreurs CD/DVD, le tout entrecoupé de rééditions multiples. Les livres sur les magnétoscopes et sur les caméscopes ont été traduits en espagnol et celui sur les magnétoscopes également en russe. J'ai réalisé par la suite une vidéo distribuée en VHS sur la maintenance des magnétoscopes, mais qui est sortie un peu trop tard je pense. L'idée était présente depuis un moment, mais la mise en place a été compliquée, et pour finir j'ai tout fait moi-même dans mon studio.
PACKED : Quel était le contenu de vos cours au départ ? Ont-ils changé depuis ?
Jean Herben : Oui, mon cours évolue aussi en fonction de l'évolution des technologies. Au départ par exemple, il comportait des parties sur des formats vidéos comme le VCR, le Betamax et le V20009, qui étaient à l'époque des formats très prometteurs. Pour le V2000, toute une série de problèmes sont apparus le rendant inexploitable et en ce qui concerne le Betamax, il a largement perdu la bataille qui l'opposait au VHS en Europe. Par conséquent, le Betamax et le V2000 ont très rapidement disparu de mon cours. Actuellement, malgré leur disparition progressive, les magnétoscopes VHS sont toujours au programme de mon cours et mon cours sur la télévision reste focalisé sur la télévision analogique car c'est encore de cette manière que fonctionnent majoritairement les téléviseurs. Cependant, ce cours intègre de plus en plus le numérique, les écrans plats et le MPEG-210.
PACKED : Pensez-vous que le savoir des techniciens en vidéo analogique est en train de disparaître ?
Jean Herben : Il est certain que les techniciens et électroniciens en vidéo sont en voie de raréfaction et c'est d'ailleurs pourquoi mes étudiants trouvent plutôt facilement du travail car ils ne sont pas nombreux à avoir ce bagage technique au sortir des études. Dans toute la Belgique nous sommes les seuls à former de tels techniciens, et cette année il y a uniquement trois étudiants dans la section vidéo. En revanche, 2010-2011 sera une bonne année avec plus d'étudiants dans la section.
En France, Thomson a créé une école qui s'appelle le Réseau Ducretet11 qui forment des techniciens de maintenance et des vendeurs. La société allemande ASWO12, qui fournit des pièces détachées, assure certaines formations. Les fabricants comme Sony, Philips, etc., qui proposaient des formations, ne donnent plus de cours en tant que tels. Ils manquaient même de personnel pour faire ça et j'ai moi-même été formateur freelance pour Sony et Philips en Belgique. En 1993-1994, j'ai reçu une demande de Philips pour donner des cours à leurs techniciens et j'ai donné quatre cours en tout sur la télévision, les téléviseurs et les magnétoscopes à Namur puis à Liège. Sony m'ont eux demandé de donner des cours car leur formateur les avait quitté et ils avaient besoin de quelqu'un pour le remplacer. J'ai ainsi donné des formations pendant deux ou trois ans en parallèle à mes cours. Aujourd'hui, il existe quelques cours spécifiques de temps en temps sur internet en vidéo-conférence mais cela ne concerne pas les équipements anciens, seulement les nouvelles technologies.
Comme je l'ai déjà dit, jusqu'à la fin des années 1970, chaque ville importante de Belgique avait un centre avec certainement cinq ou six techniciens. Puis petit à petit ces centres ont disparu et le dernier technicien est lui aussi parti avec son savoir.
PACKED : Quelles pannes sont les plus fréquentes avec les magnétoscopes ?
Jean Herben : La courroie de chargement13 de la bande qui patine, était une panne récurrente avec les magnétoscopes. Il y a le problème des têtes et de leur usure qui concerne tous les lecteurs vidéo sans exception car ces dernières s'encrassent pendant la lecture des bandes. Les courroies en caoutchouc qui avec le temps deviennent informes est aussi un problème récurrent. Ce sont les seules pannes qui me paraissent communes à tous les lecteurs, ensuite, il s'agit plutôt de pannes qui sont liées à un modèle en particulier.
PACKED : Y a-t-il de grandes différences entre les marques pour les lecteurs VHS ?
Jean Herben : Oui les pannes ne sont pas exclusives à un type de support pour le VHS mais plutôt à un modèle ou à des marques. Chaque constructeur et chaque modèle a ses défauts. Philips pour prendre cet exemple, a mis sur le marché trois mécaniques qui leur étaient propres, mais très compliquées et avec une mauvaise fiabilité. Certaines pièces comme le galet presseur14 connaissaient des problèmes qui nécessitaient purement et simplement leur remplacement. Une autre panne classique du galet intermédiaire15 intervenait lors des rembobinages. Le caoutchouc du galet presseur se salissait et provoquait une panne qui était solutionnée en le nettoyant au thinner16. Il arrivait aussi que le tendeur de bande se décolle ou encore dans les caméscopes, que les deux guides bandes qui viennent entourer le tambour se desserrent, etc. Tous ces problèmes n'existent pas sur le matériel professionnel.
PACKED : Certaines pannes sont-elles aisément identifiables ?
Jean Herben : Quelques-unes : oui, mais cela est surtout lié à une certaine expérience de la maintenance. Par exemple, quand une cassette ralentit au rembobinage cela veut dire la plupart du temps, qu'il faut nettoyer le galet intermédiaire, l'idler. Dans les téléviseurs, des défauts d'ondulation de l'image, indiquent souvent que les condensateurs17 commencent à perdre leur capacité.
PACKED : Quels étaient selon vous les meilleurs magnétoscopes VHS ?
Jean Herben : Pour moi JVC à toujours fait les meilleurs magnétoscopes VHS, ce qui paraît logique dans la mesure où c'est eux qui ont inventé cette norme d'enregistrement. De bons magnétoscopes réalisés entièrement en Europe sont rares. Philips avait en contrepartie un service de maintenance très efficace et une documentation toujours bien faite. Mais j'ai toujours eu le sentiment que leur philosophie était « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ».
La chute des prix des équipements a entraîné une perte de fiabilité. Un exemple : le plastique a remplacé tous les cylindres en métal qui permettaient auparavant à la bande de bien effectuer son trajet.
PACKED : Quelles sont les règles à suivre pour entreposer des équipements ?
Jean Herben : Pour les lecteurs à technologie laser, il est clair qu'il faut éviter toute fumée de cigarette car elle est très néfaste. Le laser ne s'use pas, mais la fumée de cigarette dépose une couche de goudron qui s’apparente à une usure. Même s'il existe encore des moyens de gonfler le laser par la suite, cette intervention peut être évitée.
L'humidité est un problème pour les lecteurs vidéo. Pour certains d'entre eux, il suffit qu'ils soient restés quelque temps exposés à l'humidité pour ne plus fonctionner car il existe un capteur près des têtes qui capte le taux d'humidité. Sur les lecteurs haut de gamme comme Panasonic ou Sony par exemple, le tambour était muni d'un système de chauffage, et une fois le taux d'humidité revenu à une valeur acceptable, le lecteur fonctionnait de nouveau. Au bout d'un certain temps, les constructeurs ont supprimé le capteur car les livreurs arrivaient parfois chez un client avec un lecteur qui ne fonctionnait pas, parce que le véhicule dans lequel il avait voyagé était humide et cela faisait bien évidement « mauvais genre ».
PACKED : Faut-il conserver les équipements dans les boîtes fournis par le constructeur ?
Jean Herben : Je dirais que quand ils ne sont pas utilisés, c'est une bonne manière de les conserver car ils sont à l'abri de la poussière. Les boîtes sont généralement munies de sachets de silica gel18 qui absorbent l'humidité. De plus, le polystyrène expansé, lorsqu'il y en a, protège un peu l'équipement en cas de choc.
PACKED : Quelles autres recommandations sont importantes pour allonger la vie des magnétoscopes ?
Jean Herben : Les courroies douteuses doivent être remplacées systématiquement. Ne prendre que des cassettes de bonne qualité, c'est à dire ne pas choisir des marques inconnues. Personnellement je fais confiance à TDK et à Sony pour les VHS. À une époque Agfa avait fait de bonnes cassettes du point de vue des couleurs et du rendu de l'image mais elles étaient très abrasives pour les têtes. Nettoyer les têtes de lecture est bien évidement essentiel pour garder un magnétoscope le plus longtemps possible en état de fonctionnement, mais cela ne doit pas être fait par un profane.
PACKED : Comment doit-on nettoyer les têtes d'un magnétoscope ?
Jean Herben : Je nettoie les têtes avec de l'alcool isopropylique19 et un chiffon que je manipule avec un doigt. J'opère de la même façon pour les parties en caoutchouc. Mais je le répète, la qualité de la bande est une donnée essentielle, une bande de mauvaise qualité abîme plus vite un lecteur et encrasse fortement les têtes.
PACKED : Peut-on utiliser des cassettes de nettoyage vendues dans le commerce ?
Jean Herben : Pour un lecteur comme un magnétoscope VHS, une cassette de nettoyage est proscrite car l’accès aux têtes n’est pas compliqué. En revanche, pour les plus petits lecteurs et enregistreurs, comme ceux des caméscopes HI820 ou miniDV21 par exemple, une cassette de nettoyage est plus efficace.
PACKED : Est-il toujours facile de trouver des pièces ?
Jean Herben : Pour les pièces détachées, ASWO est indispensable. Avant les pièces devaient être disponibles 10 ans après la fin de fabrication et de vente d'un produit. Puis, ce délai est tombé à 8 ans, puis 7 ans. Construire de nouveaux équipements coûte aujourd'hui moins cher que de payer un technicien de maintenance. Les premiers téléviseurs couleurs Philips étaient vendus pendant trois ans. Aujourd'hui, chaque année, trois modèles différents arrivent sur le marché. Faire changer les têtes revient plus cher qu'acheter un magnétoscope neuf. La difficulté est d'avoir un service rentable.
Ceci dit, avec les appareils de grande marque, trouver des pièces détachées n’est pas vraiment un problème. Panasonic, à une époque, faisait même des kits avec plusieurs pièces, comme les courroies et certains engrenages. Je pense que Sony doit encore posséder des pièces pour des lecteurs Betamax. Les équipements de marques Multitech, Protech, etc., ont en moyenne un rebut prévu de 20 %, ce qui veut dire que sur 50 appareils vendus, 10 tomberont en pannes. Ils ont alors 10 appareils dans lesquels ils vont puiser des pièces de rechange, puis quand il n'y a plus de pièces, les appareils ne sont plus dépannés.
PACKED : Faut-il faire des stocks de composants électroniques ?
Jean Herben : Oui et non. Personnellement, j'ai déjà jeté des stocks de condensateurs, parce qu'à trop long terme ils vieillissent même s'ils ne sont pas utilisés. Par exemple, tous les appareils utilisent des condensateurs dits 105°C22. Ce type de condensateurs vieillit très mal, et neuf fois sur dix ils sont à l'origine d'une panne. L'avantage d'avoir un stock, est la disponibilité immédiate des composants, mais ils vieilliront également en situation de stockage.
PACKED : Vous avez beaucoup travaillé avec les téléviseurs, quelle précaution faut-il prendre pour les conserver en état de fonctionnement le plus longtemps possible ?
Jean Herben : Pour les téléviseurs et moniteurs, je pense que la chose la plus importante est de ne jamais les éteindre mais de les laisser en « mode stand-by »23. Ainsi, il y a beaucoup moins de pannes car le moniteur conserve une chaleur constante. L’argument écologique est ridicule car premièrement, cela consomme très peu d'énergie et deuxièmement parce que d'un point de vue écologique, il vaut mieux avoir un téléviseur en « stand by » qu'un téléviseur déclassé parce qu'il est en panne.
Ensuite, il y a le risque que l'image affichée sur un écran à tube cathodique s’incruste dans l’écran si ce dernier affiche une image fixe. Un phénomène d'impression du phosphore par le rayonnement du canon se produit. C'est surtout vrai avec les écrans noir et blanc, d'ailleurs cela se remarque souvent avec les moniteurs de surveillance du fait des scènes statiques filmées. Pour palier ce phénomène, certains moniteurs déplacent l'image imperceptiblement pour éviter une brûlure de l'écran.
Ce sont les contrastes forts qui usent le plus un tube cathodique. Un contraste réglé trop haut use prématurément un tube cathodique, car les parties blanches de l'image sont celles qui reçoivent le plus d'électrons. Un réglage adéquat du contraste est la première chose à faire avec un moniteur.
PACKED : Qu'est-il possible de faire lorsque le tube cathodique lui-même est endommagé ou usé ?
Jean Herben : Étant donné que les trois canons du tubes cathodique sont chauffés à 1 000° C par le filament24, il arrive que ce filament se casse, cependant cela est relativement rare. Ensuite, un vieillissement du tube lié à la température générée par les canons entraîne un détachement des particules de métal. Ces dernières sont ensuite attirées par la bobine de déflexion25, et bouchent les grilles des électrodes. Par conséquent, moins d'électrons parviennent jusqu'aux luminophores26. Il existe des régénérateurs de tubes cathodiques, dont le principe consiste à envoyer un courant dans le canon pour pulvériser toutes ces petites particules. J'ai régénéré des dizaines de tubes cathodiques de cette manière mais il arrive toujours un moment où le tube cathodique est véritablement trop usé.
PACKED : Comment était gérée la documentation à Telectro ?
Jean Herben : Chez Telectro, la documentation était absolument indispensable du fait du nombre important de dépannages qu’il y avait à effectuer. La société était abonnée aux services de documentation qui coûtent vraiment cher. Lorsque Telectro a fermé, j'ai récupéré une grande partie des manuels. Il y avait aussi toute une série d'addenda27 pour les modifications que le constructeur apportait sur les équipements en cours de production. Classer toute cette documentation était un travail vraiment fastidieux, mais qui pouvait se révéler indispensable. Lorsque ce classement n'avait pas été fait correctement, un technicien pouvait mettre deux fois plus de temps à dépanner un appareil. Les jeunes techniciens utilisent aujourd'hui des plans numérisés, sous forme de fichiers informatiques. Je continue à préférer le papier qui disparaît au profit des versions électroniques. C'est une question de génération. À une époque les manuels existaient même sous forme de microfilms.
J'ai toujours trouvé la documentation Philips mieux faite que chez les autres constructeurs. Cependant, il m'est arrivé d'avoir l’une ou l’autre panne produite par un composant absent de la documentation. Il avait été ajouté sur une centaine d’appareils parce qu’il permettait d’éliminer un problème local. Soit la documentation comportait effectivement une erreur, soit l'addendum n'avait pas été classé correctement par manque de temps.
PACKED : Pensez-vous qu'un technicien partagé entre plusieurs institutions muséales soit une solution valables pour ces dernières ?
Jean Herben : Oui, si les collections ne peuvent pas avoir un technicien spécialisé en interne, alors c'est une bonne solution, car il connaîtra bien le parc de machines de chacune des collections. Je dirais qu'idéalement il faudrait deux techniciens. La parfaite connaissance d’un équipement ne met pas à l’abri d’une défaillance du technicien et avoir un collègue à qui demander de poser un regard neuf sur une panne peut aider à solutionner un problème compliqué. C'est de cette manière que de nombreuses pannes ont été résolues dans les différents services de dépannage où j'ai travaillé.
PACKED : Pour finir, conservez vous vous-même des équipements ?
Jean Herben : Oui, j'ai plusieurs équipements dans le laboratoire à l’ISET. Nous avons, en 1994, récupéré le matériel des studios de la RTBF28 de Liège. Il s'agit de matériel pour émettre, ainsi que plusieurs kilos de bandes 1 pouce29 et de cassettes Betacam30, avec sur certaines d'entre elles des émissions de la RTBF enregistrées. Je conserve également chez moi un certain nombre d'équipements achetés tout au long de ma carrière.
Notes