La documentation est le processus de collecte et d'organisation des informations concernant l'oeuvre — y compris son état, son contenu et les actions effectuées pour la préserver.
La nature interactive de beaucoup d'œuvres à composantes informatiques implique que sa documentation doit couvrir un champs plus vaste de données que pour les œuvres vidéo monobande ou pour les films conventionnels. Le catalogage requiert non seulement de collecter les données concernant les fichiers numériques qui composent l'œuvre — ce que l'on appel les métadonnées — mais aussi les informations à propos du comportement de l'œuvre — c'est à dire ce qu'elle fait.
L'art à composantes informatiques qui est interactif ou basé sur le temps a des comportements uniques qui doivent être documentés si on veut préserver l'œuvre correctement. Le point de départ idéal pour documenter le comportement est l'artiste. Mener une interview d'artiste ou lui soumettre un questionnaire est devenu une pratique de plus en plus commune dans les institutions possédant une collection.
Ces interviews comprennent des questions du type :
Quelle est l'histoire de la production de l'œuvre?
Quel logiciel, matériel et système d'exploitation ont été utilisés pour créer l'œuvre?
Quelle est l'essence de l'œuvre? Quels sont les aspects qui doivent absolument être maintenus au travers du processus de préservation pour que l'œuvre soit considérée comme intacte?
Quels changements spécifiques sont acceptables, s'ils sont nécessaires pour garder l'œuvre en vie?
Quelles sont les limites physiques et conceptuelles de l'œuvre? Quels sont les composantes pouvant être considérées comme essentielles et à l'inverse celles pouvant être remplacées (p. ex., des magnétoscopes devenus obsolètes)?
Quels sont les comportements importants de l'œuvre et l'aspect qu'elle doit nécessairement avoir? Quelles caractéristiques, si elles étaient perdues, devraient nous faire considérer l'œuvre comme "morte"?
Ces informations seront cruciales dans l'éventualité où le médium original d'une œuvre devenait obsolète.
Une autre composante utile de la documentation concerne la façon dont le public interagit avec l'œuvre. Interviewer des membres de l'audience, réaliser des captures d'écran avec des images fixes ou des captations vidéo, copier les répertoires et sous-répertoires de l'œuvre, utiliser des diagrammes ou un bref récit de l'œuvre pour résumer les interactions ou échanges particuliers avec l'œuvre, tout cela aidera pour une future installation de l'œuvre. (Gardez à l'esprit que ce genre de documentation possèdes ses propres besoins en termes de préservation.)
D'autres formes de documentation sont également importantes. Collecter des documents en relation avec la création, l'exposition et la réception critique de l'œuvre, comme les feuillets, livrets et plans d'exposition, portfolios, ou encore photographies de son installation ou de son exposition.
Pour des informations supplémentaires sur la documentation de l'art à composantes informatiques et des nouveaux médias, sur les standards et schémas de description actuellement développés, consultez le Capturing Unstable Media project du V2_Organisation, la Database of Visual Art de la Danube University Krem, Le Réseau des Médias Variables et la ArtBase de Rhizome.
Les métadonnées comme mentionné plus haut, sont des données à propos de données, documentant des informations techniques à propos d'un fichier numérique — toutes depuis les plus basiques comme la date et le format de création jusqu'aux informations se rapportant aux codecs, à la compression, etc.
Si les stratégies de documentation abordées plus haut sont développées au sein du monde de l'art, les métadonnées sont également importantes pour les bibliothèques, les archives, les entreprises, les agences gouvernementales — toute entité ayant à traiter des informations importantes sous forme numérique. Ce sont des groupes comme ces derniers qui ont mis en place les standards et schémas de métadonnées.
Toutefois, dans le monde de l'art numérique :
Gardez en tête que mis à part l'obsolescence des formats et du matériel, l'erreur humaine et une mauvaise prise en charge des fichiers est le danger le plus important pour la préservation des œuvres numériques. Il est essentiel de collecter des données à propos des fichiers et de leur emplacement avec soins et de façon systématique afin d'assurer leur longévité.
Pour obtenir une documentation approfondie des différentes composantes complexes et interdépendantes qui constituent ces œuvres, il est essentiel de faire un inventaire au niveau de la pièce, de chaque fichier vidéo, audio, mais aussi des logiciels, du matériel et des systèmes d'exploitation nécessaires pour lire les fichiers. Il est tout aussi important que l'œuvre et chaque pièce d'archives lui étant associée soient interreliée dans la base de données afin de pouvoir identifier toutes les parties d'une même œuvre. Cela peut-être fait en créant un identifiant unique pour chaque œuvre et en utilisant des variantes de ce dernier pour chacune des différentes parties.
Un document décrivant le contenu de l'œuvre devrait être créé, avec une description individuelle pour chaque fichier lui étant lié. Des descriptions séparées au niveau de la pièce pour les fichiers sont nécessaires car les fichiers numériques auront des métadonnées d'ordre technique et des informations de création différentes. S'il y a plusieurs versions d'un fichier numérique (par exemple, fichier de travail ou fichier final), les données descriptives doivent permettre d'identifier quel fichier est le fichier final ou "authentique" devant être utilisé pour recréer l'œuvre ou la montrer.
En général, les métadonnées peuvent être divisées en quatre catégories générales : descriptives (décrivant le contenu de l'œuvre) ; techniques (décrivant la création technique du fichier et ce qu'il faut pour le lire) ; de préservation ; et administratives (qui inclues des informations sur la manière dont l'œuvre à été acquise et sur les droits qui lui sont affiliés).
La liste de champs plus bas donnera une idée de ce qu'englobe chaque catégorie - et combien de données il est nécessaire de récupérer.
Descriptive
(Les données descriptives doivent composer l'enregistrement de "l'œuvre" ; l'information contenue dans cet enregistrement est applicable à chaque version du fichier numérique.)
un identifiant unique
numéro d'acquisition de l'œuvre
titre
titre(s) altérnatif(s)
artiste(s)/créateur(s)/développeur(s)/designeur(s) (contributeurs principaux et équipe technique)
date de l'œuvre finale
description sommaire de l'œuvre
sujet/genre (descripteurs du contenu pouvant aider à trouver l'œuvre)
Technique
taille du fichier
génération (important lorsque vous voulez indiquer que le fichier est un clone et que vous souhaitez pouvoir tracer le nombre de copies existantes)
version (p. ex. , est-ce un fichier de travail ou un fichier final ; utilisé pour identifier l'authenticité)
partie d'un autre fichier édité
format du fichier
date de création (du fichier, pas de l'œuvre finale)
profile colorimétrique : RVB ou CMJN (couleur) ou valeur de gris/monochrome (noir et blanc)
nombre d'images par seconde
schéma de compression (si applicable)
taux de compression
sonore ou muet
matériel utilisé pour créer le fichier
logiciel/application/programme utilisé pour créer le fichier
matériel requis pour lire le fichier
logiciel requis pour lire le fichier
autres équipements nécessaires pour visualiser le fichier
distinguer les composants propriétaires, open-sources et uniques
installation (si applicable)
navigateurs compatibles
systèmes d'exploitation requis
plug-ins nécessaires
Préservation
notes d'inspection
qui a réalisé l'inspection
description de la documentation
notes de conservation (incluant les mesures de conservation prises et par qui elles l'ont été)
support physique de stockage
emplacement physique d'entreposage
emplacement du serveur de sauvegarde
date de la dernière sauvegarde
Administrative
date d'acquisition
mode d'acquisition (don ou achat)
éditeur de l'œuvre
détenteur des droits
restrictions
Nommer les fichiers
À la création de chaque fichier, suivez les conventions de nommage établies et assurez-vous d'ajouter l'extension du fichier. Ces conventions doivent être établies au début du projet. Le nom du fichier peut être basé sur l'identifiant unique. Le plus important étant que le nom du fichier soit unique, qu'il ne soit pas dupliqué dans un autre projet ou ailleurs sur vos serveurs. Ne donnez pas aux fichiers des noms très basiques qui pourraient potentiellement désigner plusieurs fichiers différents (p. ex., 001.tif, 002.tif, etc.).
Étiquetage des équipements et des supports
Les dispositifs matériels pour lire, archiver, ranger et entreposer des œuvres - comme des disques dur, des Zips et des écrans — peuvent être identifiés avec des étiquettes utilisées pour les objets d'archives. Des supports de stockage comme les disquettes, les Zips ou les disques optiques peuvent être identifiés avec des étiquettes sans acides, indiquant le numéro d'identification unique de l'œuvre correspondante.
Gardez à l'esprit que l'adhésif des étiquettes peut sécher et qu'elles peuvent se détacher. Les supports optiques comme les CDs ou les DVDs devraient être rangés dans des boîtiers en polyproplylène avec des étiquettes en papier sans acides. L'identifiant unique d'une œuvre devrait être écrit sur la partie centrale en plastique transparent du disque avec un feutre marqueur pour les archives, sans-solvant, à base d'eau et à encre indélébile.
Les jaquettes du boîtier devraient comporter les informations suivantes :
Identifiant numérique unique
titre(s)
format(s) de fichiers
artiste/créateur
date de création de la copie
étape ou version de l'œuvre